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Jakub Julian Ziolkowski

Jakub Julian Ziolkowski


Le travail de Jakub Julian Ziolkowski, présenté pour la première fois dans une institution en Suisse, dépeint un univers fictif, riche d’éléments narratifs et de détails et habité d’émotions et d’obsessions. Les motifs grouillent sur les toiles, leur rencontre fait germer une sensation de multiplication hallucinée. L’imaginaire de cet artiste polonais est un emboîtement de références — de la géométrie de l’abstraction moderne au Street Art, en passant par Guston, Jérôme Bosch ou encore R. Crumb.

RÉALISME CARNAVALESQUE
Si un sentiment d’urgence et de vitalité domine le travail de Jakub Julian Ziolkowski, il n’est pas présenté sous une forme qui soit facilement absorbable. Son œuvre ne conviendra pas à ceux pour qui l’esthétique se doit d’être facile à digérer. Au contraire, le visiteur est littéralement écrasé par une telle productivité, et d’autant plus par les dispositifs iconographiques gargantuesques dont il use. Le travail de Jakub Julian Ziolkowski s’apparente à un bestiaire humain, chaque émotion se métamorphose en une forme physique : animale, minérale, végétale ou spatiale. Le visiteur, après avoir essuyé une attaque visuelle, sort aussi indemne que possible de cette cacophonie grotesque et sensuelle. Pourtant, définir le travail du peintre comme un simple chaos spontané serait ignorer l’impact de sa démarche. Car il y a dans l’impression monumentale d’excès que laissent ses tableaux une vision du monde qui n’est pas sans signification pour la pensée culturelle contemporaine.Son œuvre noue le dialogue avec la lie d’une répugnanteréalité quotidienne et, commec’est le cas dans sa dimension carnavalesque, manifeste un désir de déréifier le monde socio-culturel, de libérer le potentiel refoulé de la sensualité, du corps et du profane. Le travail de Jakub Julian Ziolkowski est aussi étrange que scatologique. Il s’illustre d’ailleurs à travers d’innombrables images gutturales. Des organes digestifs, absorbant la vie et la transformant, sont dépeints dans « Oesophagus », 2008. Un cœur monstrueux, tout palpitant, est figuré dans « Magic Hat » (2007). Et partout dans son œuvre, la raillerie récurrente de la mort est incarnée par une foule de figures squelettiques, comme dans « Hotel Supernova » (2007), où un squelette coiffé d’un haut-de-forme divertit avec son violon un petite assemblée de cafards, tandis qu’un autre batifole parmi les toiles d’araignée, un pied planté dans un lavabo, l’autre dans une cuvette de W.-C.

L’ECOEURANTE ET MAGNIFIQUE ALTERITE DE LA VIE
Sans nul doute, la pratique de Jakub Julian Ziolkowski remet résolument en question les abstractions de la pensée idéaliste. Dans son œuvre, nous affrontons un régime conceptuel et sensoriel privilégiant le somatique et le quotidien. Un système où l’altérité, sur une fréquence carnavalesque, devient l’entrelacement corporel du moi et de l’autre. Dans « Sans titre (Journey) », 2007-2008, le corps est présenté en un état de fluctuations extrêmes, des formes corporelles externes et internes, des membres et des organes de sexes différents se bousculent pour se frayer une place dans l’image. Le rythme circulaire et la nature existentielle du travail de Jakub Julian Ziolkowski pourraient probablement rappeler l’Ecce Homo de Léonard de Vinci. Mais la roue de la vie à laquelle il nous confronte est absolument incontrôlable, remettant en question une vision ordonnée du monde et la place de l’humanité en son sein. Au commencement de chaque tableau, le peintre affronte un vide, la toile étant le désert personnel contre lequel il s’agit de catapulter l’altérité parfois merveilleuse, parfois ignoble, de la vie. Pratique artistique sans solutions finales, l’œuvre de Jakub Julian Ziolkowski affirme la possibilité même d’une différence culturelle et défend une politique de l’impureté dont les implications s’étendent bien au-delà du seul domaine esthétique.

Une proposition de Katya García-Antón

Image de couverture: Jakub Julian Ziolkowski “untitled (journey)”, 2007-2008, courtesy de l’artiste et Hauser & Wirth Zurich, Londres.
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